4 • Hedwige Bull

Hedwige BULL, Une vie au service des Arméniens
Née en 1887 en Estonie, dans une famille luthérienne, Hedwige Bull cultive très tôt un don pour les langues et l’enseignement alors que sa vie de foi l’engage au service des plus démunis. Elle se forme dans les domaines de l’éducation, du social et de la foi chrétienne avant d’être envoyée en 1911 par la mission allemande du Hilfsbund à Marache, dans la région de Cilicie en Anatolie.

Hedwige Bull à Alep

Sa mission est de s’occuper d’orphelins arméniens issus des importants massacres orchestrés par le sultan ottoman de 1895 à 1897. Sur place, elle est accueillie par la missionnaire suisse Béatrice Rohner avec laquelle elle partage une foi profonde et un engagement sans faille : toutes deux vont offrir à ces enfants une éducation et un accompagnement de qualité.

Lors du génocide, à partir de 1915, Béatrice Rohner sera une personne clé de l’aide humanitaire apportée illégalement par les réseaux de missionnaires protestants aux déportés arméniens. Hedwige sera elle aussi directement témoin de la brutalité de ces déportations. Affectée à un nouvel orphelinat à partir de 1916, elle réussira, avec ses collaborateurs et à force d’obstination, à sauver les enfants dont elle avait la charge. C’est dans ce contexte que Paul Berron fait la connaissance de Béatrice et d’Hedwige.

Béatrice Rohner, Marie Steyger (infirmière alsacienne) et Hedwige Bull à Alep, dans les années 1920 

Éprouvée par ces années difficiles, Hedwige rentre en Estonie en 1919 mais n’hésite pas à répondre à l’appel de Paul Berron qui l’envoie à Alep en 1922, comme missionnaire de l’ACO. Elle dédiera les trente prochaines années de sa vie aux rescapés arméniens dont elle maîtrisera parfaitement la langue !

Portrait de Hedwige Bull 

À Alep les conditions de vie des réfugiés sont désastreuses. Avec ses collaborateurs européens et arméniens, Hedwige, infatigable, œuvre afin d’améliorer leur situation.

Elle sillonne les camps pour visiter les rescapés traumatisés, leur offrant une aide d’urgence vitale et un réconfort humain et spirituel. Un centre de soins gratuit voit rapidement le jour. Elle insiste auprès des autorités pour la création d’un système d’eau potable. Elle planifie la construction de nouveaux bâtiments pour abriter divers projets d’entraide, notamment des ateliers de tissage et de broderie permettant d’assurer des moyens de subsistance aux plus démunis. Les productions sont vendues par l’ACO en Europe.

Photo du haut Distribution d’huile de foie de morue
 Photo du bas Centre de soins polyclinique

Les situations familiales
sont très difficiles

Beaucoup de femmes sont des veuves avec enfants. Les plus pauvres sont accueillies dans une maison appelée Sarepta. Grâce à des donateurs européens un système de parrainage permet à des enfants de bénéficier d’une éducation et d’une aide alimentaire. Un centre de vacances est même créé à la montagne pour remettre en forme les enfants les plus affaiblis durant les mois d’été. L’ensemble de ce travail sera toujours accompagné par le partage de temps de prières et de cultes.B

Photo du haut Qui veut partir en colonie de vacances ?
Photo du bas Formation d’institutrices.

Dans une seconde phase, « Miss Bull » s’investira pour permettre aux Arméniens de devenir propriétaires et de bâtir des logements plus dignes. Elle participa ainsi à la construction des nouveaux quartiers arméniens d’Alep alors que la ville se modernise.

Construction de nouveaux logements

Planches et matériel de construction

De sa retraite en 1955 jusqu’à son décès en 1981, elle nourrira une correspondance suivie avec ses anciens protégés et collaborateurs. Elle restera très active et pourra retourner quelques fois en Syrie pour y retrouver ses « enfants » et leurs descendants qui lui exprimaient leur reconnaissance en l’appelant Mayrig, « mère », un surnom à la fois affectif et respectueux.

Hedwige à Alep

Hedwige avec des enfants dans son logement à Alep

Témoignage de Maria Melkésétian, née à Marache en 1920

«Ayant fui les massacres, nous nous sommes réfugiés à Alep où, très jeune, je suis devenue orpheline à la mort de mon père. En ces jours-là, par ordre de la Providence, une main charitable est venue à notre secours. Comme un ange terrestre, «Mère» Miss Büll nous a accordé son aide. Grâce à elle, j’ai pu suivre mes études au collège Emmanuel […]
Au bout de seize ans de mariage, je me suis retrouvée veuve avec six filles en bas âge. Une fois encore, cette main secourable m’a encouragée pour que je puisse travailler.
Ces bienfaits nous ont été prodigués pendant de longues années. C’est avec gratitude et des sentiments chaleureux que nous évoquons le nom de Mademoiselle Büll, celle qui nous a sauvées de bien des malheurs et d’injustices.  Je demande à Dieu que nous soyons touchés par la grâce afin que nous puissions, selon nos possibilités, venir en aide aux plus faibles. Que tes os reposent en paix, Mère Miss Büll ».